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On ne devrait pas être là…

Maria Thunholm

Des nouvelles

Les amis de l’enfance.

Robert do Silva, son uniforme sale, sur les champs de bataille des corps des deux côtés, à ses côtés ses camarades de guerre, la femme à sa droite s’appelle Marine, son nom de famille n’avait aucune importance, à côté d’elle Stéphane, il pleure en regardant la photo de sa sœur avant de la remettre dans la poche, l’ordre donné, il est temps d’attaquer les ennemis, les anciens amis. Ils montent sur les barricades et commencent à courir pour tuer les ennemis.

Dans le bunker Jeanne Legrand s’apprête à sortir pour défendre les lignes, le lieutenant Chart donne l’ordre de sortir, les tireurs d’élite restant dans le bunker, les munitions des canons sont usées, ils avaient reçu l’ordre d’y rester pendant le temps que les autres troupes étaient à la retraite, la bataille semble perdue de l’avance. Jeanne sortie en regardant les ennemis s’approcher d’eux, elle prend son fusil, elle tire et espère qu’elle survivra.

Robert voit les barricades des ennemis, des camarades tombent, les autres continuent à avancer, il y a beaucoup de blessés, qui risquent de mourir à cause de leur blessure. Il voit des traces de mines, des cadavres devant les barricades, ses camarades, la plupart étaient inconnus, il court vers un endroit où il semble être déserté, près d’un bunker, il arrive à tuer quelques soldats.

Jeanne court vers l’autre bunker, elle voit un soldat, seul et d’autres qui entourent son bunker, il faut éliminer le soldat. Elle commence à apercevoir la silhouette, le visage semble familier, elle vise son fusil, elle y hésite, quand l’homme s’approche et baisse le fusil.

Robert s’approche d’une soldate qui vise d’abord avec son fusil, puis elle le baisse. Il avait son pistolet-mitraillette visé vers elle, mais baisse son arme quand il la reconnait, Jeanne, ils avaient passé les étés ensemble, au bord de la mer, ils se retrouvent seuls dans un coin, les cris lointains.

Elle s’accroupit et lui fait signe de faire la même chose. – On est censés nous entretuer, mais je n’arrive pas.

Il s’accroupit à ses côtés, un sourire mélancolique. – Je suis content de te retrouver, mais pas sur un champ de bataille, en tant qu’ennemis.

Jeanne lui regarde dans les yeux bleu clair, la tristesse y est. – Mais si l’un de nous puisse partir, survivre ?

Robert regarde son amie d’enfance, parcourt son uniforme sale, des déchirures, un fusil en un état pitoyable. – Derrière moi, il n’y a personne, vas-y, pars, je n’y dirai rien.

Jeanne prend la main de Robert. – Tu m’as manqué, les appels sur messagerie m’ont plus, mais tu me manquais.

Robert sourit. – Pareil, mais il faut que tu partes, nous sommes en train de gagner la bataille, fonce !

Jeanne se lève lentement en regardant son ami, un sourire mélancolique sur ses lèvres. – Je ne t’oublierai jamais.

Robert la voir courir vers le bois, il sourit, il murmure. – Moi aussi, si je survis la guerre. Il voit l’un de siens s’approcher et lui faire signe de venir, pour que Jeanne puisse partir. C’était Patrick, le plus jeune de son bataillon. – Vas-y le bunker est par ici. Il voit Jeanne disparaître dans le bois, il sourit gaiement.

Un an plus tard.

Dans un hôpital improvisé, Robert regarde sa jambe, celle qui reste, la gauche. L’équipe médicale avait commandé une prothèse après la fin de la guerre. Il savait que les blessés de l’autre camp étaient là aussi. Il avait demandé à l’infirmier si une certaine Jeanne Legrand de Bressuire était là, Marc, l’infirmier, disait que c’était confidentiel, mais s’il la trouva il laisserait un message. Robert né à Stockholm, patiente impatiemment quand il voit Marc entrer par la porte. D’abord Marc s’occupe des autres patients, un homme dans un fauteuil roulant, paralysé, il ne savait pas plus que ça. Marc fait le rond, jetant un coup d’œil vers sa direction, un petit sourire sur les lèvres.

Quelques minutes plus tard Marc s’arrête à côté du lit de Robert, s’assoit sur la chaise. – Elle ne te verra plus.

Robert est confus. – De quoi parlez-vous ? Elle est vivante ?

Marc sourit légèrement. – Oui, et elle est ici, elle veut te voir, mais ce n’est plus possible.

Robert agacé, regarde Marc dans les yeux. – Mais dites-moi si elle peut venir ou si je peux aller la voir.

Marc sourit. – Bien sûr, on a déjà organisé une rencontre, à son souhait. Ce que je voulais dire qu’elle est aveugle.

Robert – Merde, mais au moins elle est vivante. Quand ?

Marc fait signe à une collègue entrant par la porte, à son côté droit Jeanne avec une canne blanche, tenant le bras de l’infirmière. Elles s’approchent lentement. Robert sourit, un sourire mélancolique, il avait perdu sa jambe et elle l’a perdu la vue, au moins tous les deux avaient survécu la guerre. Deux minutes plus tard les deux infirmiers s’éloignent.

Jeanne tend la main dans l’air vide, Robert la prend gentiment, soudain elle sourit. – Robert, c’est toi ?

Robert regarde le regard vide de Jeanne. – Oui, c’est moi, on a survécu.

Jeanne répond souriant. – Oui, on est réunis.

Robert avec un sourire triste. – Je te vois, mais…

Jeanne fait signe à lui de se taire. – Chut, je peux te voir avec mes mains, laisse-moi te voir.

Robert place les mains de Jeanne sur son visage, elle commence à caresser le visage, appuyant légèrement, plaçant ses mains sur son corps, descendant vers les jambes, elle s’arrête au niveau des genoux, surprise. – Où est ta jambe droite ?

Robert sourit. – Je l’ai perdue quand une mine a explosé, mon camarade mourut, j’ai survécu, il était trop jeune pour mourir.

Jeanne, un sourire triste. – Ils étaient nombreux de mourir trop jeunes, sur les deux côtés.

Robert regarde son amie, il pense à tous ces gens morts à cause des idiots. – C’est nous, les gens ordinaires, qui avons payé le prix le plus élevé, ainsi les peuples. Il faut qu’on en parle, les criminels de guerre sont les chefs d’état, les fous de tous les camps.

Jeanne remontant ses mains vers les bras de Robert, cherchant les mains. – Mois aussi, j’ai perdu ma vue quand une mine a explosé, Johnny, le souci de Johnny Hallyday, j’ai vu ses membres exploser, juste avant de perdre ma vue, des morceaux de la mine…

Robert – Je vois, tu n’as pas besoin d’en parler. Les horreurs seront malheureusement là, dans nos rêves, dans nos douloureux souvenirs.

Jeanne avec un sourire mélancolique. – Nous pouvons en témoigner, même si les gens ne comprennent pas, certains écouteront.

Robert – J’espère on ne perdra la vue, pardon.

Jeanne – T’inquiète, je te vois avec les mains dès aujourd’hui. J’apprends à écrire, réécrire.

Robert – Si on essaye de trouver un logement ensemble, si on s’entraide ?

Jeanne sourit. – Je suis partante, mais il fait que je parte, j’entends les pas de Marianne, mon infirmière.

Robert jette un regard vers le couloir, l’infirmière s’approche. – Je la vois, mais je suis content de savoir que tu as survécu.

Jeanne sourit chaleureusement. – Moi aussi, à bientôt.

Quelques minutes plus tard, Robert est seul de nouveau, il prend le roman, L’idiot de Dostoïevski, il s’imagine la Russie impériale avant de s’endormir.

Mauléon vendredi 20 octobre 2023